Par KEITA, Namory K. (2003)
La prise du pouvoir par l’armée en 1968 consacrait l’avènement d’un régime d’exception au Mali. Une tentative de légitimation de ce pouvoir fut selon les autorités de l’époque le retour du Mali à " une vie constitutionnelle normale en 1979 " par la création d’un parti unique constitutionnel : l’Union Démocratique du Peuple Malien (UDPM).
Ce parti-Etat a favorisé des maux comme le clientélisme et la corruption. Il était en outre caractérisé par :
Un déficit de participation des citoyens à la gestion des affaires publiques,
Un déficit de représentation des citoyens dans les institutions et structures de l’Etat,
La non prise en compte des aspirations et intérêts d’une bonne partie des populations en raison du système de gestion centralisé et monopartiste qui constituait un véritable obstacle à tout développement économique et social viable,
Et une restriction aux libertés d’opinion, etc.
Au début des années 1990, ce régime monolitique ne répondait plus aux aspirations des populations. C’est ainsi que nourrie des maux qu’il a engendrés, la révolution du 26 mars mettait fin au régime du parti unique. Dans l’euphorie de cette révolution à caractère socio-politique, la constitution du 12 janvier 1992 en son article 28 consacrait le multipartisme.
A la faveur de cette ouverture constitutionnelle tant attendue, des formations politiques commencèrent à occuper l’échiquier politique national. Aujourd’hui, le Mali en compte plus de quatre vingt (80) . Les raisons de cette multiplication sont de plusieurs ordres :
L’environnement juridique : en instituant le multipartisme sans restriction, la constitution du 12 janvier 1992 donnait la possibilité à tout citoyen ou groupe de citoyens qui avait des ambitions politiques de créer sa propre formation politique. Cette opportunité a été largement exploitée par les citoyens qui l’attendaient ;
Les ambitions politiques personnelles : tous les hommes politiques nourrissent des ambitions personnelles à travers leurs partis politiques, celles d’exercer le pouvoir en accédant à un poste électif (conseiller municipal, député ou président de la République) ou nominatif dans la haute sphère de l’Etat. Ces ambitions sont souvent contrariées lorsqu’ils ne sont que de simples militants au sein d’un parti politique et si de surcroît ils n’en sont pas membres fondateurs. C’est pourquoi beaucoup d’hommes politiques trouvent que la meilleure stratégie de conquête du pouvoir est la création de sa propre formation politique sans se référer au nombre déjà existant sur l’échiquier politique national.
La question du leadership au sein des partis politiques : au Mali la plupart des grands partis politiques ont connu le phénomène de la constitution de blocs ou tendances en leur sein suite à des divergences de vue sur la conduite de leurs affaires internes. Leur incapacité à trouver des mécanismes de conciliation de ces tendances a très souvent conduit au départ de certains responsables desdits partis concernés. Ces départs ont dans tous les cas abouti à la création de nouveaux partis politiques. Après analyse des circonstances des départs, il demeure constant que la formation de tendances ne sont en réalité que des manifestations des questions de leadership au sein des partis politiques.
Une analyse du contexte de la multiplication des partis politiques nous permet d’affirmer que le phénomène est plus porté par des ambitions personnelles que par un réel dynamisme politique.
En effet les promoteurs des nouvelles formations politiques ne sont pas porteurs de nouveaux projets de société dans bien de cas. IL n’est d’ailleurs pas rare de constater que les formations transfuges s’identifient aux idéaux des partis dont leur promoteurs sont issus. Les projets de société qui devraient faire la différence et justifier la création de nouvelles formations politiques ne sont pas en cause.