Par Edoh Gally Ata (Lomé, juin 2009)
Les bouleversements politiques et économiques de 1990 qu’a connus le Togo(pays d’Afrique de l’ouest) ont eu un impact très important sur la gestion des ordures et déchets produits par la population de Lomé sa Capitale.
Affaibli, l’Etat à lui tout seul ne pouvait venir à bout du problème d’insalubrité et d’assainissement dans la ville de Lomé. C’est alors que des jeunes des quartiers se sont regroupés en associations et en ONG afin d’apporter une solution à l’insalubrité qui gagnait la ville.
Mais malgré cette initiative des jeunes, le problème de déchets n’est pas totalement résolu. Entre deux quartiers contigus, le contraste est parfois trop frappant. Pour illustrer ce genre de contraste, nous prenons le cas du quartier Tokoin Habitat et celui du quartier Tokoin Gbadago où nous avons mené une enquête visant à la compréhension de ce phénomène de deux quartiers jumeaux mais l’un très propre et l’autre très sale.
Tokoin Habitat se trouve à l’Ouest de la Ville de Lomé. C’est un quartier résidentiel habité par des personnes à revenu moyen et dont les rues sont par endroit goudronnées. Dans ce quartier, presque toutes les maisons ont souscrit des contrats d’enlèvement des ordures ménagères avec les Associations et ONG opérant sur place. Etant donné que dans ce quartier de riches, on paye bien et à temps les redevances mensuelles de ramassage d’ordures, toutes les maisons son salubres. Les rues sont propres et on ne note aucun dépotoir sauvage ou trou à ordures. La population est toujours satisfaite d’après les habitants de ce quartier que nous avons rencontrés.
En revanche, le quartier Tokoin Gbadago est un vieux quartier de Lomé contigu au quartier Tokoin Habitat, c’est un quartier populeux où vivent des gens démunis qui n’ont pas les ressources suffisantes pour payer la redevance mensuelle de collecte d’ordures. Les rues sont sales, les égouts sont à ciel ouvert et l’on jette les ordures à chaque coin de la rue. Seuls quelques ménages qui remuent ciel et terre pour payer les redevances mensuelles sont servis par les associations et ONG. La majorité de la population de ce quartier laissée à elle-même, créent des dépotoirs sauvages, creusent des trous à ordures et continuent de végéter dans un environnement très insalubre.
D’après l’enquête menée par l’ONG VDAE (Volontaires pour le Développement et l’Assainissement de l’Environnement), une structure qui travaille dans la pré-collecte d’ordures ménagères, ces associations ont mis l’accent sur l’aspect lucratif de l’activité. Ce ne sont pas dans la réalité des structures à but non-lucratif. Au nom de la rentabilité, elles proposent leurs services aux quartiers habités par les classes moyennes. On préfère nettoyer et rendre les maisons des riches propres au détriment des maisons des pauvres. L’explication nous vient donc de l’objectif de ces associations qui, loin d’être des structures créées pour soulager les populations, se comportent comme de véritables entreprises privées. C’est le profit d’abord et tant pis pour ceux qui ne peuvent pas payer.
Le service d’enlèvement des ordures ménagères dans ce contexte est un service pour les classes moyennes et donc non inclusif. Les populations des quartiers pauvres ne peuvent pas se sentir concernées par un tel service. Ils continuent donc dans leurs pratiques peu soucieuses d’hygiène, de salubrité et d’environnement. Parce que les classes les plus vulnérables sont majoritaires à Lomé, les efforts consentis dans les quartiers des classes moyennes auront l’effet d’une goutte d’eau dans la mer.