By SALL, Aliou
Il y a une loi qui gère le patrimoine foncier. Mais il y a aussi les droits. A savoir le droit coutumier. Les communautés maritimes accèdent à la terre grâce à l’autorité coutumière, reconnue par l’Etat et dotée de pouvoirs de décision sur les conditions d’occupation de l’espace maritimes par ses usagers : A quels endroits précis haler ses pirogues pour les pêcheurs, installer ses claies de séchage pour les transformatrices ?
Deux phénomènes remettent progressivement en cause ce droit d’accès et de participation à la gestion des terres du littoral. Premièrement, il ya le développement du tourisme et de ses activités connexes : plaisance, camping, activités sportives de luxe, etc. Dans la région de la Petite Côte qui est un pôle de développement des activités touristiques par excellence et depuis récemment Saint Louis, il existe un conflit entre la pêche et la transformation d’une part et le développement du tourisme et de ses activités dans les zones côtières, d’autre part. A l’image de certains villages comme Hann où la transformation a complètement disparu faute d’espace pour les femmes, les communautés de pêcheurs auront une grande équation à résoudre dans un proche avenir : comment défendre son droit d’accès à la terre tout en faisant évoluer cette situation conflictuelle vers une saine et paisible cohabitation entre tourisme et pêche ?
Deuxièmement, la décentralisation induit un conflit de compétence entre autorités municipales et autorités coutumières dans certaines situations pour la gestion foncière. Ces problèmes ne sont épargnés que dans les cas où l’autorité coutumière sympathise avec le pouvoir ou répresente une courroie de transmission pour ce dernier. En général, la tendance qui se dessine dans ce processus de décentralisation est la suivante : des organisations de jeunes et des reponsables coutumiers s’organisent contre la spéculation foncière pratiquée par certaines municipalités. Ces dernières qui souffrent du manque de moyens (car l’Etat a surtout décentralisé les problèmes, mais pas les moyens), considèrent le peu de poches foncières encore disponibles comme alternative pour une partie du budget nécessaire à leur fonctionnement. Enfin la création de communes d’arrondissement qui se sont substitués dans le cadre de la décentralisation aux villages traditionnels, a rapproché certains élus locaux comme les maires des populations. Si une telle politique administrative permet de donner aux localités une certaine autonomie, elle a engendré une certaine « sanction de proximité » pratiquée par les élus sur les populations qui n’expriment pas forcément une sympathie à l’égard du pouvoir en place. En effet, dans bon nombre de municipalités (c’est le cas au Sénégal), les maires pensent que le service public est destiné à ceux qui les ont élus. A partir de là, on peut déduire que décentralisation ne rime pas forcément avec bonne gouvernance.